3 La Cour haute couture | Les carnets de Versailles

La Cour haute couture

On saura tout sur l’histoire du vêtement – ou presque – grâce à « We wear culture », un projet numérique labyrinthique consacré à la mode, que l’on visite en ligne sur Google Arts & Culture. Avec des musées du monde entier, le château de Versailles se prête au jeu et met en lumière, dans une galerie de portraits virtuelle, l’habit de cour au temps de Louis XVI et de Marie-Antoinette.

Le château de Versailles compte parmi les 180 partenaires que fédère le projet « We wear culture » autour de l’histoire du vêtement, aux côtés, entre autres, du Musée des Arts décoratifs, du Metropolitan Museum of Art de New York et du Kyoto costume Institute. Grâce à ce réseau, plus de 500 expositions ont été mises en ligne autour des icônes, des courants, des coulisses de la mode, et de ses multiples points de jonction avec la création artistique. Évolutions stylistiques, techniques et savoir-faire de la confection d’habit et d’accessoires sont éclairés par les commentaires de professionnels de la mode, d’historiens et de conservateurs. D’un clic à l’autre, on traverse 3 000 ans d’histoire et les kilomètres qui séparent les continents : le tee-shirt à slogan engagé, les drapés du sari indien et la dentelle de Calais côtoient des pièces de légende comme la petite robe noire de Coco Chanel, ainsi que la mode raffinée du Versailles des années 1780.

C’est pour son caractère foisonnant que les commissaires de l’exposition virtuelle « La Mode à Versailles », Géraldine Bidault et Vincent Bastien, se sont attachés à cette époque. « Les années 1780 sont une période très riche artistiquement parlant. L’anglomanie, la venue d’ambassadeurs originaires d’Asie, l’orientalisme et la pensée rousseauiste suscitent des émulations et des tendances nouvelles qui influencent considérablement la mode à la Cour » (Géraldine Bidault). C’est aussi pour ses résonances avec les formes actuelles que la mode des années 1780 s’avère passionnante : « À la fin du règne de Louis XVI, les codes changent. On abandonne la robe à panier pour adopter des tenues plus simples, droites et souples, qui inspirent toujours les grands créateurs, de Dior à Yves Saint-Laurent ou Chantal Thomas » (Vincent Bastien).

La comtesse de Ségur, en tenue simple, des grandes créoles suspendues aux oreilles, la tête couverte d’un chapeau et les cheveux non poudrés. Antoinette-Elisabeth-Marie d'Aguesseau, comtesse de Ségur, Élisabeth Vigée Le Brun (1785).

Cette exposition, déployée en deux galeries, « Elle » et « Lui », décline la mode au masculin et au féminin à travers les plus beaux portraits conservés au Château. Gravures, dessins, bustes et peintures – parmi lesquelles plusieurs de la main de Louise-Élisabeth Vigée Le Brun – sont réunis pour illustrer les tendances en vogue à l’époque et le vent de nouveauté qui soufflait à la cour. Ni savante ni futile, l’exposition introduit, comme autant de pistes à développer, des clés utiles pour décrypter ce dress code qui savait si bien conjuguer sophistication, élégance et fantaisie. On découvre là que le riding-coat, issu de l’anglais « tenue pour monter à cheval », a formé la française « redingote » ; plus loin, l’origine de l’expression « être collé aux basques de quelqu’un » s’éclaire grâce à une gravure représentant un habit de printemps à la française. Surgissent, au détour de ces portraits de cour, des termes savoureux, tels l’extravagant pouf à la Belle Poule (coiffe de gaze et de faux cheveux), la légère robe d’intérieur dite robe « en gaulle » ou la bourgeoise « robe retroussée dans les poches », que l’exposition illustre et rend familiers.

Le duc de Brissac, vêtu du costume de capitaine des Cents Suisses, qui conjugue collerette, panache et habit argenté à motif floral. Louis-Hercule-Timoléon de Cossé, duc de Brissac, anonyme.

Histoire et technologie dialoguent dans cet espace où les « modèles » se laissent approcher comme jamais, grâce aux caméras ultra-précises qui ont permis de numériser certains tableaux en Gigapixels. Nul besoin d’être geek ou mordu de mode pour apprécier l’expérience : on savoure le moiré du satin, les couleurs chatoyantes, les épais velours, et la facilité avec laquelle les œuvres de l’une des plus grandes collections de portraits deviennent visibles, dans leurs moindres détails.

En s’invitant dans les galeries de « We wear culture », le Château créé sa quatrième exposition virtuelle avec Google Arts & Culture, après celles de « Louis XIV. La construction d’une image politique », « Immortaliser Versailles » et « Louis XIV et Nicolas Fouquet. Une certaine histoire de goût », déjà disponibles sur cette plateforme. Résolument éclectique, cette dernière permet d’explorer une impressionnante diversité d’objets, d’œuvres, d’archives et de sites issus de plus de 70 pays. Grâce à des technologies qui, comme le street view et la numérisation en très haute définition, ont fait le succès de Google, cet espace ouvre au plus grand nombre les collections d’institutions renommées et plus confidentielles. Et permet de compenser l’expérience de la visite, quand l’éloignement géographique l’en empêche.

Clotilde Nouailhat


Une exposition virtuelle réalisée par Vincent Bastien et Géraldine Bidault (commissariat), sous la direction d’Yves Carlier et de Béatrice Sarrazin.  Coordination du projet numérique : Maïté Labat et Marie Delamaere.

Exposition accessible sur le site g.co/wewearculture et via l’application Google Arts & Culture sur iOS et Android.


Visitez la galerie La mode à Versailles : Elle  et La mode à Versailles : Lui.

Retrouvez le glossaire de l'exposition sur le site Internet du château de Versailles.

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