3 Un théâtre de poche dans les jardins du Petit Trianon | Les carnets de Versailles

Un théâtre de poche dans les jardins du Petit Trianon

C’est un lieu qui échappe aux regards. Profitons de la récente restauration des décors de scène du Petit Théâtre de la Reine pour nous plonger dans l’époque où Marie-Antoinette, en personne, montait sur les planches pour jouer la comédie devant un public d’intimes.

Vue intérieure du Petit Théâtre de la Reine © château de Versailles / Thomas Garnier

Le Petit Théâtre de la Reine est un édifice discret enchâssé dans les jardins du Petit Trianon. Grâce à la restauration des décors de la forêt et de l’intérieur rustique, qui dormaient depuis plus d’un siècle dans ses coulisses, on a pu mettre en scène il y a quelques années, l’opéra-comique Le Roi et le fermier de Pierre Alexandre de Monsigny. Une recréation d’autant plus émouvante, que c’est justement Le Roi et le fermier qui avait été donné lors de l’inauguration du Petit Théâtre de la Reine, le 1er août 1780. Entourée de sa Troupe des Seigneurs composée de membres de la famille royale et de proches courtisans, Marie-Antoinette, reine de France, y avait interprété le rôle de Jenny, une jeune bergère.

Vus de près, ces décors anciens ne sont que taches et coups de brosse ; mais à distance de spectateur, ils se muent en trompe-l’œil de paysages, d’édifices et d’intérieurs d’habitation. Par le jeu des machineries anciennes, la forêt se métamorphose en intérieur rustique avec une rapidité qui en dit long sur le savoir-faire des machinistes de l’époque.

Pour l’avenir, Jean-Paul Gousset, directeur technique de l’Opéra royal, et son équipe envisagent d’installer au Petit Théâtre de la Reine un « conservatoire des techniques de scène » qui présenterait objets et documents racontant l’histoire de ce curieux endroit. Mieux encore, les animateurs du lieu rêvent de remettre en service ses décors, machineries, et éclairage pour en faire un « théâtre entièrement machiné », prêt à l’emploi, comme sous le règne de Louis XVI. On peut donc espérer voir un jour se dresser de nouveau les huit plans du délicieux «palais à volonté » qui était planté sur scène à l’époque. Il sera alors possible de proposer aux visiteurs d’assister, comme dans l’Armide de Gluck, à l’écroulement du palais de la magicienne éponyme. Les frises de décors s’envoleront dans les cintres, tandis que les châssis disparaîtront dans les dessous. La machine à tonnerre fera gronder l’orage, secondée par la machine à pluie. Quelques feux d’artifices et des vapeurs pourraient compléter la catastrophe. Un spectacle rare, virtuose et poétique, dont l’intensité préfigure les effets spéciaux les plus élaborés du cinéma d’aujourd’hui.


Le Petit Théâtre de Richard Mique, architecte de Marie-Antoinette

Théâtre de Marie-Antoinette, Richard Mique, 1778-1780 ©château de Versailles / Thomas Garnier

Alors que l’Opéra de Versailles appartient à la famille des théâtres de Cour, la petite salle de Trianon est un théâtre de société, comme il en existait dans de nombreuses résidences à la campagne où, pour passer le temps, les propriétaires et leurs invités montaient des pièces ou des opéras. En 1780, Richard Mique construisit sur l’ordre de Marie-Antoinette ce théâtre dont la sévérité de l’extérieur contraste avec la délicatesse de l’intérieur. Par ses harmonies de bleu, blanc et or, il rappelle en plus petit l’Opéra de Versailles. Une centaine de personnes seulement pouvait y être admise. Mais le plus grand luxe n’est pas dans la salle de bois peint de faux marbre blanc veiné et ornée de sculptures en carton-pâte : il réside dans la machinerie pour les changements de décor. Sur la scène de Trianon, on jouait les auteurs à la mode, Sedaine, Rousseau, on chantait des opéras entiers.


Visites guidées : « Les effets scéniques au Théâtre de la Reine »

Réservations obligatoires par téléphone au 01 30 83 78 00, en ligne sur www.chateauversailles.fr ou sur place le jour même (dans la limite des places disponibles).

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